Jean-François Raffaëlli : Un cri du cœur sur l’art et les artistes
Dans un manuscrit autographe de 17 pages, datant de 1890, le peintre et écrivain Jean-François Raffaëlli livre une conférence passionnée sur l’art et les artistes.
Ce texte, riche en ratures et corrections, témoigne de la réflexion profonde de l’auteur sur la condition artistique de son époque.
La vocation contre la carrière Raffaëlli insiste sur la nécessité de la vocation, affirmant que l’art n’est ni une carrière, ni un gagne-pain. Il oppose deux voies : celle des « grands artistes de 1830 », indépendants et novateurs, et celle de « l’administration », incarnée par les artistes académiques, chefs de bureau d’une institution sclérosée.
Les épreuves de l’artiste L’artiste véritable, selon Raffaëlli, doit affronter la calomnie, l’ironie et l’incompréhension du public. Il évoque les exemples de penseurs et d’artistes méprisés, tel Jean-François Millet, accusé de socialisme. Il souligne les difficultés matérielles rencontrées par les génies tels que Millet, Corot, Delacroix, Berlioz ou Carpeaux, qui ont vécu pour leur art, sans fortune.
Le succès, une denrée rare Seuls quelques-uns trouvent le succès, et beaucoup sacrifient leur jeunesse. Raffaëlli cite Émile Zola, « chargé de gloire aujourd’hui et riche », qui regrette ses vingt ans. Il constate que des centaines d’artistes envient la sécurité matérielle d’un emploi administratif. L’art, une armée ? Raffaëlli dénonce l’organisation de l’art en France, qu’il compare à une armée, avec ses généraux, ses avancements et ses subordonnés.
Il critique les récompenses officielles et le manque de reconnaissance pour les artistes novateurs. Le beau, une notion relative La querelle artistique de l’époque, selon Raffaëlli, oppose le « beau absolu » de l’art académique au « beau relatif » du caractère.
Il cite une conférence de Whistler sur l’art industriel, dénonçant la production de masse et la perte du goût. L’art et l’utilité Raffaëlli se réfère au livre de Lamennais, « De l’Art et du Beau », qui associe le beau à l’utile. Il donne de nombreux exemples, montrant que la beauté se trouve dans la raison et l’utilité des choses, même dans ce qui semble laid ou inutile.
Ce manuscrit de Jean-François Raffaëlli est un témoignage précieux sur la vision de l’art à la fin du XIXe siècle. Il offre une réflexion profonde sur la condition de l’artiste, tiraillé entre vocation et nécessité matérielle, entre indépendance et reconnaissance officielle.